DEFICIT DES ANNEES ANTERIEURES  -  Action and Japanese Demonstration       /     Fractal  333


> Blog Website : Le Khyroscope - 29 Avril 2010

Il y a de ces labels....je vous dis....

Les gens derrière le label français Fractal sont tout simplement géniaux. Ils osent sortir des trucs iconoclastes et rééditer des chefs d'oeuvres. Rock Japonais, Free-jazz, musiques contemporaines, expérimentales... Ma première altercation avec le catalogue Fractal fut avec leur réédition des deux volumes du Frank Wright Quartet: «Center of the World» et «Last polka in Nancy ?», deux testaments vibrants d'un saxophoniste trop peu endisqué. Par la suite, ce fut le fabuleux duo d'Arthur Doyle et Sunny Murray «Dawn of a New Vibration», un des mes disques préférés de free-jazz encore à ce jour.

Ils ont osé aussi reprendre deux titres majeurs du catalogue Futura, soit l'album de Fille qui Mousse et Jac Berrocal «Musiq Musik». Lepuis longtemps épuisés, Fille qui Mousse vient de se faire rééditer par le label Futura en cd. Mais ils ne répondent pas à mes demandes incessantes de faire la même chose avec celui de Jac Berrocal, insistez auprès d'eux ici.

Arrive la réédition de Déficit Des Années Antérieures... Ce disque est étrangement sorti en 1982, mais cette réédition comporte des ajouts de documents audio datés de 1985 «Musique et Bruit du Bas Pa-Tât». Quel disque intéressant. On à ici un album se rapprochant de l'esthétique et de la démarche des Sun City Girls via leur série Carnival Folklore Resurrection. Sauf que, tandisque les SCG faisaient dans le punk bruitiste, DDAA jouaient de la musique ethnique pseudo-japonaise inventée et le résultat est excellent. Qualifiant leur musique d'«antimusic», les membres de DDAA semblent plus appartenir à une école issue de la performance ou à la limite du Fluxus. Mais cela n'enlève rien à leur aptitude de jouer des instruments et ils viennent créer des perles musicales. La présence de beatbox électro sur quelques pièces leur donne un quelquechose de plus qu'on retrouve rarement dans ce genre de musique ( bon cette musique est surement la seule en son genre , mais vous voyez l'idée...), s'inscrivant très bien dans l'époque où ont eu lieu ces sessions d'enregistrements. Guitare acoustique et électrique, koto ? (c'est crédité no koto, mais on dirait vraiment du koto), percus, saxophone, voix, synthés, instruments préparés... Cette musique imaginaire improvisée (all songs unwritten and composed by ... ?) vaut la peine d'être découverte.

Le groupe existe toujours et continue de sortir des disques, principalement des collaborations avec d'autres artistes, visitez leur myspace.

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> TRAVERSES MAGAZINE Nr.24 /  2 Aout 2008 - (France) :

Sans doute parce que l'herbe paraît toujours plus verte ailleurs, on aurait tendance à oublier que la scène indé-expé-indus a aussi eu ses pionniers en France. Si la Grande-Bretagne a eu (et a toujours) NURSE WITH WOUND, si l'Allemagne a eu CAN, l'hexagone n'a pas été en reste, avec notamment DÉFICIT DES ANNÉES ANTÉRIEURES, qui a démarré à la fin des années 1970 et continue encore aujourd'hui d'œuvrer sur un terrain underground toujours plus obscur, comme l'a prouvé leur « concert plasmatique » donné dans le cadre de L'Étrange Festival à la Maison des Métallos, à Paris, en avril 2008. Ca fait donc près de trente ans que ce trio de Basse-Normandie s'active à diffuser son utopisme artistique polymorphe (fièrement qualifié de « vielle musique nouvelle » !) à travers des peformances scéniques aussi rares qu'exceptionnelles, et par le biais de maints supports : K7, 45 tours, 25 cm, 33 tours, vidéos, CD, la plupart publiés sur leur propre label, Illusion Productions, sans oublier leurs contributions à maints compilations thématiques, comme ont fait d'autres groupes réfractaires aux sunlights (UN DÉPARTEMENT, LA S.T.P.O., PTÖSE...). Devenu une référence de la marge française, le groupe qualifie fièrement sa production discographique de « vieille musique nouvelle » !
Aux commandes depuis les origines, Jean-Philippe FEE, Sylvie MARTINEAU-FEE et Jean-Luc ANDRÉ sont moins des musiciens, au sens classique du terme, que des plasticiens. On notera au passage que les initiales du groupe, D.D.A.A., forment l'anagramme de
« DADA ». La référence à ce mouvement de pensée qui mis à mal les ornières artistiques au début du XXe siècle n'est évidemment pas anodine, puisque D.D.A.A. cultive à l'instar de celui-ci le goût du collage et de l'assemblage (sonores), et l'improvisation est son domaine de prédilection. Mais il ne s'agit pas pour D.D.A.A. de simplement détruire ou narguer les convenances, mais plutôt de déconstruire les formats musicaux usuels pour concevoir d'autres traces créatives.

Ses opus discographiques sont ainsi conçus comme des capteurs d'images prises durant leurs pérégrinations dans moult espaces à travers le temps et les cultures. Ainsi, dans leurs premières années, après leurs Aventures en Afrique (1980) et avant leur visite dans la Russie tzariste (Les Ambulants), le groupe a exploré la « nébuleuse japonaise » avec Action et Démonstration japonaise (1982), qui fut en fait leur premier véritable LP. L'importance historique de ce dernier se double d'une fort belle réussite artistique qui n'a pas perdu de son pouvoir de fascination.
Cet album explore une douzaine de projections liées à la « réalité occidentale du Japon ». Chaque pièce a été finement et minutieusement pensée comme un tableau jouant avec des archétypes sonores que l'Occident se fait de la culture japonaise, mais déviés et fondus dans des images sonores faisant intervenir des sources acoustiques, synthétiques et électriques. Guitares (basse, fuzz, préparée ou électrique), percussions, flûtes, claviers, voix vernaculaires, bandes et bruitages dessinent des reliefs climatiques riches, distillant un vaste horizon de mystères poétiques. Tout comme l'art traditionnel japonais fourmille de ces estampes appelées « ukiyo-e », littéralement « images du monde flottant », D.D.A.A. livre ses images flottantes d'un monde japonisant à la naïveté envoûtante.
Cette salutaire réédition en format CD, remixée et remastérisée jusqu'au bout des ongles, reproduit le LP d'origine sous forme de pochette cartonnée pliée à la main et avec deux rabats. Outre les inserts originaux, le livret contient des textes et même des photos inédites du groupe sur scène en 1979. De plus, l'œuvre en elle-même a été augmentée de deux titres bonus tirés de la session d'enregistrement de l'album. Et comme si ça ne suffisait pas, on lui a adjoint une autre œuvre, Musique et Bruits du Bas Pa-Tat, formée de sept piécettes enregistrées pour une K7 qui accompagnait en 1985 la bande dessinée Mutants du Kwantung, conçue par l'un des membres de D.DA.A., Jean-Luc ANDRÉ. Si l'on quitte le Japon, ce n'est pas pour aller bien loin puisque l'on se retrouve dans la Chine d'avant J-C. Cette réédition, aussi somptueuse dans sa forme que par son contenu, prend ainsi des allures de compte-rendu d'une
« nébuleuse extrême-orientale » qui compte parmi les plus belles inspirations du DÉFICIT DES ANNÉES ANTÉRIEURES.

Stéphane Fougère.

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> NEOSPHERES Website - Octobre 2008 (France) :

L'excellent label Fractal Records, pourvoyeur de pop cérébrale mais pas sérieuse et d'expérimentale à hautes sensations psycho-acoustiques, voire psychédéliques, réédite l'une des pierres angulaires de la discographie de Déficit Des Années Antérieures, Action and Japanese Demonstration de 1982. Enregistrés par une équipée dadaïste à l'ère des premiers personal computer, les dix titres d'origine n'étaient pas tout à fait des haïkus, mais une sévère bourrasque entre tradition et modernité, surréalisme et vers à pieds, où la musique industrielle est le fruit d'un artisanat fait mains. Ils sont agrémentés de bonus plutôt conséquents: deux inédits de la même session et les sept morceaux de Musique et Bruits du Bas Pa-Tât sortis en 1985 sur une cassette accompagnant la bande-dessinée de Jean-Luc André Mutants du Kwantung.
Eric Deshayes.

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